Quand on est éditeur de logiciel SaaS, il y a un débat vieux comme le monde lorsqu’il s’agit de définir son pricing. C’est d’ailleurs une question qui revient sans cesse dans les différentes communautés du secteur.

Faut-il adopter un contrat annuel ou facturer mensuellement sans engagement ? 🤔

Notez tout de suite qu’il s’agit juste d’un retour d’expérience et qu’il ne faut surtout pas y voir une règle à suivre et d’ailleurs, nous allons commencer par ça 😇

Disclaimer : l’annuel n’est pas pour tous les SaaS

Parmi la multitude d’offres SaaS, un modèle ou l’autre va convenir en fonction de différents paramètres. C’est même le plus souvent une combinaison des deux modèles.

Si la solution SaaS est facile à adopter tout seul, peu coûteuse et à la recherche d’un gros volume de clients, la vente en self-service va s’imposer. Dans ce cas, l’utilisateur étant amené à procéder au paiement tout seul, l’avantage d’avoir un prix facial bas et pas d’engagement lève évidemment bien des freins à l’achat.

Par contre, dans le cas où la vente se conclut systématiquement au téléphone, et encore plus si l’offre est complexe ou stratégique, il peut être plus intéressant de proposer un contrat annuel, pour amortir plus sûrement le coût humain de la relation commerciale.

On peut résumer les éléments différenciants dans le tableau suivant (bien qu’évidemment il n’y ait pas de règles et probablement des milliers de contre-exemples) :

Engagement mensuelEngagement annuel
✅ Coût d’acquisition faible
✅ Onboarding et self service simples 
✅ Setup en autonomie
✅ Non stratégique
✅ Panier moyen inférieur à 500€/mois
✅ Paiement en self-service
✅ Coût d’acquisition élevé
✅ RDV avec un SDR puis un sales
✅ Setup assisté
✅ Stratégique
✅ Panier moyen annuel supérieur à 1000€
✅ Paiement via ADV

Différence entre engagement et paiement mensuel

Il est important de faire la distinction entre le mensuel sans engagement et le paiement mensuel échelonné.

Dans le premier cas, le client est libre de tout engagement : il suffit qu’il résilie son compte à tout moment pour arrêter le contrat (généralement dès l’échéance suivante).

Dans le second, le client s’engage effectivement pour un an. Le paiement mensuel est alors une facilité de paiement, généralement facturée plus chère que le paiement one shot.

Les avantages du contrat annuel

Lorsque Salesforce a lancé pour la première fois ses abonnements en 2000, son CRM coûtait 50 dollars par mois, facturé chaque mois. Le prix est passé à 65 dollars l’année suivante (et y est resté jusqu’en 2016), mais quelque chose d’intéressant a changé en 2011. 

C’est à ce moment-là que Salesforce a commencé à exiger des plans annuels. 

Au cours de la dernière décennie, alors que les prix des logiciels augmentaient de 62% en moyenne, les abonnements annuels sont devenus la nouvelle norme. La plupart des logiciels vous permettent toujours de payer mois par mois si vous le souhaitez. Mais la majorité affiche désormais des plans annuels par défaut.

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Pourquoi cette tendance ?

💰 Pour la trésorerie (Cash is king)

Bien évidemment, un paiement annuel est très important en termes de trésorerie : quand vos clients vous payent 12 mois d’avance, vous collectez effectivement l’intégralité de votre booking dès la signature.

De la même manière, vous êtes assurés de vos 12 mois de MRR, ce qui est rassurant (mais crée aussi des obligations en termes de suivi client).

🏛 Pour sécuriser votre parc client

On l’a particulièrement bien vu en cette période de covid : mieux valait avoir une base en engagement annuel qu’une base basée sur des licences mensuelles, faciles à supprimer en cas de situation exceptionnelle…

Plusieurs start-up ont vécu quelques mois difficiles en raison de ce modèle : si un client confronté à un chômage partiel massif peut stopper ses licences, il ne va pas se gêner.

❤️ Pour les équipes Customer Success

Comme on le voit dans ces cohortes extraites de notre compte Chartmogul, nous avons effectivement un seul événement de churn par cohorte : nos équipes traitent en Mars les reconductions de Mars n-1, n-2 etc.

L’avantage principal est que cela simplifie la gestion du cycle de vie client.

Bien entendu, quand on vend en annuel, il est essentiel de savoir détecter en temps réel les clients à risque de churn, même si celui-ci est éloigné dans le temps.

Le customer journey est ainsi adapté tout au long des 12 mois d’abonnement, avec différents points de contacts directs (e-mails, appels sortants).

Il est aussi conseillé de mettre en place des outils de mesure de la santé des utilisateurs, en surveillant leur engagement avec votre solution et les indicateurs classiques comme le NPS et le CSAT.

Plusieurs solutions vous permettent de synthétiser diffférents indicateurs pour déterminer des scores de santé clients et des alertes en cas de risque de churn ou de downgrade.

🎩 Pour vos VC (si vous en avez ou en voulez)

On le sait tous : les investisseurs ont une forte aversion pour le risque.

Une base entièrement en mensuel comporte un risque inhérent au modèle : dans l’absolu, un grand nombre de clients pourraient churner en même temps. La présence d’une proportion d’abonnements annuels est donc un élément très rassurant pour les investisseurs.

De plus, avec le paiement annuel, vous présentez généralement une croissance plus linéaire et vous évitez les effets en dents de scie qui peuvent faire très mal dans un slide-deck.

Une croissance sûre, régulière et linéaire est une des caractéristiques du paiement annuel.

Et au-delà de vos VC, ce sera aussi apprécié de vos partenaires bancaires ou de la BPI.

📊 Pour votre CFO

Même s’il existe de nombreuses solutions pour gérer des parcs clients en abonnements mensuels, cette gestion est souvent complexe, surtout si elle est combinée à des actions de vente additionnelle ou de ventes unitaires (services, crédits…).

Si la mise en place parait simple, avec le temps arrive la complexité : multiplication des tarifs, des modèles de facturation, des outils de gestion des abonnements…

De plus, s’agissant le plus souvent d’abonnements payés par carte bancaire, les paiements mensuels demandent plus d’administration des ventes, notamment quand les cartes expirent ou sont en opposition. C’est d’ailleurs en partie ce qui justifie dans notre cas un tarif plus élevé et c’est comme ça que nous l’expliquons au client.

Bien entendu, l’engagement annuel ne résout pas tous ces problèmes, mais disons qu’il permet de les écarter pour la partie du parc qui choisira cette formule.

👨🏼 Pour votre client

Et oui, même votre client peut préférer spontanément le paiement annuel. C’est d’ailleurs souvent le cas dans les grandes entreprises, qui ne paieront jamais par carte bancaire.

N’oubliez pas que pour le comptable de votre client, le mensuel sans engagement c’est 12 factures à saisir par an, 12 rapprochements bancaires à effectuer…

Même si votre client a choisi du mensuel pour éviter de s’engager, il est probable qu’il préfère payer annuellement si on lui propose gentiment. Plus sur ça en fin d’article.

Et la conversion dans tout ça ? 

Bien évidemment, quand on parle de contrat annuel, la première réaction est de penser que cela va forcément avoir un impact négatif sur la conversion.

Vendre annuellement paraît une barrière insurmontable que l’on remet à plus tard, l’essentiel étant que le client s’abonne sans frictions.

Pour autant, dans notre exemple de ventes directes par téléphone ou visio, c’est au contraire un atout car cela s’inscrit dans une démarche de vente d’une solution sur le long terme.

Bien sûr, nos sales ne manquent jamais de nous dire “Ha si on avait une offre sans engagement…”. 

Mais nos statistiques montrent qu’en fait, ce motif a un impact très faible sur notre taux de transformation.

Par ailleurs, il faut aussi savoir s’adapter : dans certains cas, nous pouvons proposer un abonnement de quelques mois, notamment quand l’engagement est vraiment le frein principal à la signature d’un deal.

De la même manière, quand le paiement est conséquent et que l’entreprise démarre, nous pouvons aussi proposer un échelonnement sur deux ou trois mois. 

Bref, on trouve toujours des solutions mais, dans notre cas, l’essentiel est que les clients comprennent qu’ils s’engagent dans une vraie relation de long terme.

Evidemment, si vous disposez d’une offre sans engagement, alors vous pouvez adopter une stratégie à plus long terme, comme expliqué ci-dessous.

Comment faire tendre son parc client vers le paiement annuel ? 

Offrir une prime pour l’annuel

Que ce soit avec ou sans engagement, la plupart des SaaS proposent un montant plus élevé en cas de paiement mensuel. Bien entendu, sans cette incitation, la plupart des clients choisissent le mensuel, donc il n’y a pas trop de débat là dessus.

L’ampleur de la remise se mesure principalement par rapport au gain de temps et à la limitation du risque d’impayé.

Le discount généralement constaté en SaaS est de l’ordre de 20%, souvent 17% (présenté comme deux mois offerts).

Il n’y a donc pas de règles, ce choix dépendant souvent de la qualité de votre base mensuelle existante. En effet, si vous vendez facilement en mensuel, avec très peu de churn ou d’incidents, vous aurez tendance à privilégier le mensuel et ses plus hauts revenus.

On constate de faibles remises souvent avec des outils qui savent se rendre indispensables, comme Algolia ou Shopify : une fois déployé, il est très improbable que vous changiez de solution du jour au lendemain.

Bien expliquer la remise 

La page de présentation des tarifs est souvent la page la plus cruciale sur un site marketing SaaS. Souvent parmi les pages les plus visitées, il est impératif qu’elle soit ultra-lisible et que le prospect puisse se faire une idée du prix qu’il va payer en un clin d’œil.

Quelques règles sont à respecter comme dans l’exemple de Calendly ci-dessous.

  • Un sélecteur permet de passer des prix annuels aux prix mensuels
  • Les prix annuels (moins chers) sont affichés par défaut

Il est donc nécessaire pour l’utilisateur de demander spécifiquement les prix mensuels, faisant du tarif annuel la première impression laissée au prospect.

Ce n’est cependant pas l’avis de Lemlist, qui lui présente d’office le prix mensuel. Une stratégie qui consiste probablement à miser sur le soulagement du prospect 😅 ou plus prosaïquement de maximiser les revenus avec le mensuel.

Bref dans tous les cas, il est impératif de bien jouer sur cette différence de prix pour que l’utilisateur choisisse en son âme et conscience… et si possible l’annuel.

Faire évoluer son parc mensuel vers l’annuel

Si les arguments développés plus haut vous parlent, vous pouvez souhaiter que votre parc client tende vers le paiement annuel.

Les événements d’upsell et surtout de reconduction sont de très bons événements pour convertir un client mensuel en client annuel.

Pour cela vous avez plusieurs possibilités : 

  • Vous pouvez le proposer in-app avant le renouvellement
  • Vous pouvez effectuer un call CSM un peu avant la reconduction
  • Vous pouvez profiter de la facturation annuelle pour aider un upsell

Dans tous les cas, l’intérêt de la remise est facile à expliquer à un client déjà engagé et satisfait de votre solution. Après tout, vous lui proposez de faire des économies, ce qui est généralement bien accueilli.

Si votre système de facturation le permet, il est aussi possible d’ajouter une fonctionnalité dans votre back-office pour que le client puisse passer lui-même en annuel à n’importe quel moment.


🔍 Notre stack pour gérer nos abonnements

Chez Sellsy, l’abonnement est le moteur de la croissance, nous avons donc soigneusement choisi les éléments de notre système de facturation.

Gestion des plans et reconductions : Stripe Billings

Stripe Billings est le moteur de la gestion de nos abonnements. Il va gérer notre parc d’abonnés et la provision de leur compte, les plans et toute la mécanique d’upsell/downsell et reconduction.
C’est un outil fiable qui est bien sûr nativement connecté à notre compte Stripe que nous utilisons pour les paiements CB. Il est cependant possible de gérer également nos autres sources de paiement, comme les virements.

Gestion de la facturation : Sellsy

Bon, OK, c’est notre solution. Mais pourquoi ne pas utiliser la facturation de Stripe ?

Déjà Sellsy nous permet de gérer toute notre facturation, celle qui vient de Stripe Billings, mais aussi notre facturation de services professionnels (dans un cycle devis > facture plus classique).
Une fonctionnalité de Sellsy est particulièrement essentielle pour nous : le rapprochement bancaire automatique des virements de Stripe ou GoCardless (pour réconcilier des centaines de factures automatiquement).

Il faut aussi mentionner la présence sur Sellsy de dates de services sur les factures, indispensables pour calculer les PCA et alimenter Chartmogul

Calcul des metrics : Chartmogul

L’avantage du modèle SaaS est qu’il se pilote à l’aide de metrics faciles à comprendre pour analyser son business et son évolution dans le temps.

Pour calculer et analyser nos metrics, nous avons choisi Chartmogul qui nous permet un suivi très précis de l’activité.

Il y a bien sûr de nombreuses alternatives, mais nous sommes vraiment fans car Chartmogul se concentre sur quelques fonctions qu’il fait parfaitement, quand ses concurrents ont souvent tendance à vouloir tout faire et peuvent ressembler à des usines à gaz.